Rappel

 

     Il y a 40 ans, dans la nuit du 12 au 13 décembre 1981, le général Wojciech Jaruzelski proclamait l’état de siège en Pologne. Des milliers d’activistes de Solidarność furent  arrêtés dans la nuit et emprisonnés. Le matin, les Polonais ne comprirent pas tout de suite ce qui se passait.

                  
 En 1980, la Pologne a été secouée par des mouvements sociaux  suite à la crise économique et à l’annonce de la hausse des prix. Les Polonais avaient soif d’indépendance et de liberté. Les grèves et les revendications sont incessantes dans les usines, dans les chantiers de construction navale, et même dans les universités. La crise économique fait des ravages. Les magasins sont vides, les tickets de rationnement sont indispensables pour acheter à peine le minimum, les queues sont interminables.

Devant la vague de grèves qui s’étend dans tout le pays, la commission gouvernementale et le MKS (comité de grèves interentreprises) signent, le 31 août 1981, un accord mettant fin aux grèves et autorisant la création de syndicats indépendants et autogérés qui prendront le nom de « Solidarność » (« Solidarité »). Mais le pouvoir russe ne voit pas d’un bon œil les désirs d’émancipation des Polonais. C’est ainsi que le 17 octobre 1981 le général Jaruzelski arrive au pouvoir en cumulant les postes de Premier secrétaire du parti, Premier ministre et ministre de la défense.

Dimanche 13 décembre 1981. Les Polonais se réveillent sans savoir ce qui se passe. Ils allument la radio, de la musique classique. A la télévision, de la neige puis, soudain, le général Jaruzelski apparaît à l’écran et son discours sera  diffusé en boucle. Tous les programmes sont annulés. La population commence à comprendre. Toutes les liaisons téléphoniques intérieures et extérieures sont coupées. Les déplacements intérieurs interdits sans autorisation ainsi que les réunions, les syndicats suspendus puis dissous, les grèves interdites. L’armée prend possession des usines. L’enseignement dans les écoles et les universités suspendu.

Dans les rues silencieuses, les chars montent la garde aux endroits stratégiques. Les Polonais se rendent à la messe en silence. Personne n’ose parler, même à son voisin.

Mais la résistance des Polonais ne sera pas brisée, la lutte continuera jusqu’en février 1989 avec l’ouverture de la Table Ronde qui va permettre les premières élections libres dans un pays du bloc de l’Est.

Ces évènements en Pologne ont eu une répercussion dans notre ville, au sein du Syndicat départemental des Instituteurs de Bourges et de quelques familles berruyères.

Contexte : La création du syndicat  Solidarność en Pologne a été applaudi par de nombreux syndicalistes français, et des comités de coordination se sont créés en France. C’est ainsi que le Syndicat national des Instituteurs a invité des collègues polonais à venir découvrir le fonctionnement d’un syndicat français. Accueillis dans plusieurs villes de France, ils sont arrivés le 5 décembre 1981 pour un séjour de 10 jours.

A Bourges, une petite délégation de 5 enseignants est arrivée, accueillie chaleureusement par le syndicat et le président de l’association France-Pologne. Ils ont été hébergés dans plusieurs familles . C’étaient des instituteurs de Varsovie qui avaient laissé leur famille  pour ce bref séjour. Quelle différence ! Varsovie, avec ses interminables queues pour se nourrir  et Bourges, en décembre, avec ses illuminations, ses magasins regorgeant de tout…

Chaque jour, ils se retrouvaient rue Edouard Vaillant, au siège du syndicat, pour découvrir le travail des représentants, des enseignants dans leurs classes, mais aussi Bourges et sa région…Le soir ils partageaient la vie des familles.

12 décembre : dernière soirée, on se retrouve pour faire la fête autour d’un bon repas, on rit, on danse, le séjour a été agréable…  Et puis, le téléphone sonne, le syndicat du nord annonce la nouvelle : « Etat de guerre en Pologne ».

13 décembre : tout le monde se retrouve, Polonais, syndiqués et familles pour les nouvelles qui arrivent des autres départements. Les frontières  sont fermées. Pas d’avion. Pas de retour.

C’est  ainsi que nos collègues polonais ont partagé la vie des Berruyers pendant 5 semaines. Que de souvenirs !